Le
Réveillon
de Noël : comment ca se passait en 1803 ?
Eh bien, le Réveillon de Noël, en 1803, ça se passait bien, très bien
même si vous étiez amateurs de messe et de cochon. Et pas gros dormeur.
Après la messe de Noël dont nous avons parlé ici, le Réveillon
vient récompenser le patient fidèle que vous êtes. Pas de montagnes de cadeaux,
non, mais un bon Réveillon, après la messe de minuit, et en attendant la Messe
de l’Aurore.
Une poularde au riz, à laquelle il est permis cependant d'être
un chapon, est le milieu obligé de ce repas nocturne, et elle y tient lieu du
potage, qui n'y paraît jamais. Quatre hors-d'œuvres, composés de saucisses
brûlantes, d'andouilles grassouillettes, de boudins blancs à la crème, et de
boudins noirs bien dégraissés, lui servent d'acolytes. Le tout est relevé par
une langue à l'écarlate, ou plutôt fourrée, comme chacun doit l'être à la fin
de Décembre, qu'accompagnent symétriquement une douzaine de pieds de cochon
farcis aux truffes et aux pistaches, et un plat de côtelettes de porc frais.
Aux quatre coins de la table sont deux pièces de petit four, comme tourte et
tartelettes, et deux entremets sucrés, tels que crème à la vanille et flanc de
pommes à l'anglaise. Neuf plats de dessert, au plus, terminent le Réveillon, et
les fidèles ainsi restaurés se retirent pour aller chanter dévotement la Messe
de l'aurore, précédée de Prime, et suivie de Tierce.
Après la Messe de l’Aurore, il est admis de faire uN petit somme.
Il est alors six heures du Matin, environ. Vite, un léger déjeuner, et c’est la Messe du
jour.
On revient ensuite chez soi faire un petit somme, afin
d'assister, soit à jeûn, soit après un léger déjeuner, à la Messe du jour,
accompagnée d'un sermon et suivie de Sexte. C'est ainsi que les
dévots-Gourmands emploient maintenant à Paris la matinée du jour de Noël.
Bien sûr, la simple évocation du cochon nous vaut une bonne page
d’Alexandre.
On voit que le cochon joue un très grand rôle dans les
Réveillons, puisqu'il fait presque à lui seul les honneurs des deux services.
Cela n'a point été imaginé sans motifs, et il est à présumer que les premiers
Chrétiens, pour mieux se distinguer des Juifs, auxquels l'usage du porc était
interdit par leur ancienne Loi, ont pensé qu'ils devaient introduire sur leur
table ce bienfaisant animal, qui n'a rien d'immonde pour nous, et qui est
devenu le principe de tant de jouissances nutritives, qu'il est sans exemple
qu'un Gourmand ait abandonné la loi de J. C. pour celle de Moyse, de même qu'un
ivrogne ne s'est jamais fait Turc. On voit que, dans plus d'une occasion, la
gourmandise vient au secours de la Foi, et que, même en morale, elle est bonne
à quelque chose.
Comment ne pas le citer encore, au risque de vouloir fêter
Pâques en décembre :
Si la loi de Moïse n’avait pas élevé entre les Juifs et
les Porcs un mur d’airain, nul doute que les premiers n’eussent mieux aimé
faire la Pâques avec un jambon de Bayonne plutôt qu’avec un Agneau de Bethléem.
Allez, mesdames et messieurs (et les mesdemoiselles aussi), il ne
reste que quatre jours pour vous préparer !
Sources : Almanach 1ère année et Journal des Gourmands et des Belles, 1er
trimestre 1807.
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