vendredi 17 mars 2017


L'ancêtre des restaurants : les Tables d'Hôte                                                        

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, La Reynière n’était pas grand amateur de Restaurants. D’ailleurs, il en parle peu dans ses Almanachs, et surtout pas pour leur attribuer des notes : Dans la nomenclature qu’on va lire, nous n’avons prétendu établir aucun rang, soit entre les professions, soit entre les individus. En revanche, les Tables d’Hôte allient le plaisir de la chère et ceux de la conversation, et pour cela sont le rendez-vous de tout gastronome qui se respecte.

Paris était autrefois renommé pour l'agrément de ses Tables d'Hôte. C'est là que se réunissaient beaucoup d'hommes aimables qui, économes de leur temps, et n'ayant point de ménage, préféraient à des dîners en ville (…), la liberté d'une Table d'Hôte bien composée, comme il en existait alors plusieurs. On citait, surtout, l'hôtel Notre-Dame, rue de Grenelle-Saint-Honoré ; l'hôtel de Picardie et l'hôtel d'Angleterre, rue Saint-Honoré; l'hôtel de Bourbon, rue de la Croix-des-Petits-Champs, etc. Des habitués en assez grand nombre, presque tous anciens militaires, rentiers ou Gens de Lettres, formaient le noyau de chacune de ces Tables, composées en général de douze personnes. Le reste des couverts était occupé par les survenants ; mais un homme sans éducation s'y serait trouvé déplacé, et n'aurait pas osé s'y venir asseoir ; car on avait encore alors quelque sentiment des bienséances, quelque pudeur; l'argent n'établissait pas seul les distinctions sociales, et chacun savait rester à sa place.
Ces Tables étaient servies avec assez d'abondance et de goût ; et pour peu que l'on mangeât avec activité, on était à peu près sûr de n'en pas sortir l'estomac vide. Les habitués s'emparaient ordinairement du centre de la Table, et s'adjugeaient les meilleurs morceaux; mais ils prenaient volontiers la peine de servir, et faisaient en général les frais de la conversation ; en s'imposant ce double devoir, il était assez juste qu'ils fussent les mieux partagés.
La conversation de ces Tables d'Hôte était presque toujours agréable et piquante. Elle roulait sur la nouvelle du jour, la Littérature, les spectacles; et comme on s'occupait alors, très-heureusement, fort peu de politique, on pouvait se livrer sans danger à toute la liberté d'un entretien animé. Il s'y formait même des liaisons agréables et utiles, et plus d'une amitié solide y a pris naissance.

Source : Almanach des Gourmands

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