Une promenade au Palais-Royal
J’étais dimanche après-midi dans les jardins du Palais-Royal, si calmes aujourd’hui, alors que du temps de Grimod de La Reynière, dans les années 1780, c’était le plus grand bordel de France. Et je ne pus m’empêcher de penser à cette petite annonce, plaquardée dans les environs, à cette époque, et que La Reynière a peut-être lue :
« Appartements à louer dans la plus grande partie du pourtour des nouveaux bâtiments du Palais-Royal. On avertit qu'on n'y recevra que des filles, des brocanteurs, des libertins, des intrigants, des escrocs, des faiseurs de projets, des chefs de musée, de lycée, des inventeurs de ballons, des fabricants de gaz inflammable, comme plus en état de s'y plaire et de bien payer. S’adresser à M. l'abbé Baudeau, qui examinera les sujets, ou en son absence, à son secrétaire, le sieur de la Grange. »
C’est quand même plus sympa que les petites annonces du bon coin, non ?
Dans mon roman Scandales & Voluptés (à paraître, peut-être) j’en fais le point de départ d’une visite, d’un genre que vous devinerez, du haut-lieu de la débauche parisienne.
« 1784. Paris est la capitale des plaisirs. Dans la Nouvelle Babylone, la prostitution n’a pas de quartier ni de rue attitrés, et la loi, en ne l’interdisant plus, l’a encouragée. Dans les années 1780, Mercier évalue à plus de deux milles le nombre de prostituées dans les jardins du Palais-Royal ; et dans tout Paris, 30.000 filles publiques, les vulgivagues, sans compter les 10.000 femmes entretenues, environ, « moins indécentes ». C’est dire qu’une parisienne sur cinq était une putain, par occupation, intérêt ou amusement ! « Le paradis que Mahomet promet à ses Élus n’est rien en comparaison de la capitale de la France pour un homme qui peut y répandre l’or à pleines mains », avait écrit Restif dès 1770 dans son Pornographe. À force de se répandre ainsi, nombreux furent ceux qui y laissèrent leur fortune, et quelques uns, leur fortune et leur santé…
Suit alors une description très pittoresque de tout ce qui pouvait se passer dans l'Allées des Soupirs (côté soleil), où se promenaient les jeunes de fille de bonne famille, ou dans l'allée d'en face (à l'ombre), et surtout leurs arrière-boutiques (dans le noir), où grouillait une foule dont les pratiques font de notre révolution sexuelle une bleuette pour adolescents attardés, et de nos soixante-huitards, des enfants de chœur à coté des libertins de la fin l'Ancien régime - dont cet abbé Baudeau et son secrétaire très particulier, le sieur de la Grange dont il est dit dans Scandales & Volupté qu’ « on entre dans cette grange comme dans un moulin, comme dit l’abbé Baudeau. Et voilà qui fait une drôle de farine, continue-t-il en faisant mine de s'épousseter la soutane. »
La suite? Il faudra attendre un peu la publication de ce passionnant roman...
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