Aujourd’hui : le
lièvre mélancolique, surtout quand il se retrouve en civet
Impossible de terminer le mois d’octobre sans évoquer le
levraut, devenu lièvre, animal terrestre et mélancolique. L’aimable anachorète des champs et le philosophes des plaines comptent
parmi les mets les plus succulents, et continuent toujours à faire les délices
des Gourmands. L’avis de La Reynière est on ne peut plus clair.
Quoique sa viande ait été fort calomniée, et que d’après l’opinion du
célèbre docteur Pedro Rezio de Tirtea Fuera*, médecin ordinaire des Gouverneurs
de l’Isle de Barataria, beaucoup de personnes la regardent comme terrestre et
mélancolique, nous pouvons assurer qu’elle offre un mets savoureux et de facile
digestion ; et que de toutes les viandes noires, celle du lièvre est la
plus légère, la moins ferme, la moins pesante, et celle dont le jus est le
moins âcre (…) Nous le rapportons ici dans l’espoir de réhabiliter la mémoire
de ce philosophe de plaines, qui, ainsi que beaucoup de gens, vaut mieux que sa
réputation.
*
Personnage de Don Quichotte, Miguel
de Cervantès (1547-1616).
Au sommet des délices, et à l’égal des matelotes, surtout
celles de la célèbre Madame Guichard, qui tient Le Jardin Anglais sur le bucolique – alors - quai de La Rapée, très régulièrement citée par
La Reynière dans ses Almanachs jusqu’à ce qu’il lui reproche une cherté excessive, une cuisine dégénérée,
et des procédés malhonnêtes; au sommet des délices, donc, et à l’égal des
matelotes de la mère Guichard, il y a : le civet de lièvre.
Pour faire un bon civet, certains amis de La Reynière prennent
un lièvre des montagnes, qui vaudrait infiniment mieux qu’un lièvre de la plaine, tendre, gras et bien nourri, que l'on aura
surtout bien fatigué à la chasse. En voici la recette :
Civet de lièvre
Lorsque vous l'aurez dépouillé et vidé, coupez-le par
morceaux d'égale grosseur ; mettez dans une casserole un morceau de beurre et
de la farine en proportion ; faites un roux, et lorsqu'il sera presque
fini, jetez-y vingt-cinq à trente morceaux de petit lard ; passez-les à petit
feu pendant dix minutes ; mettez-y votre lièvre ainsi que vous l'avez préparé,
et faites-le revenir jusqu'à ce que la chair en soit bien ferme ; mouillez
alors votre civet avec du vin rouge et un peu de bouillon ; ayez soin que votre
ragoût soit baigné (c'est à dire que la viande nage dans la sauce) ;
assaisonnez de très-peu de sel, à cause du petit lard, mettez poivre, trois
clous de girofle, un bouquet garni de persil, ciboules, thym, une feuille de
laurier, et quelques champignons si vous en avez. Lorsque votre civet sera aux
trois quarts cuit, mettez y quelques petits oignons bien égaux et bien
épluchés; (vous pouvez les passer dans du beurre, si vous voulez, comme pour
une matelote). La sauce réduite et votre civet cuit, dégraissez-le ;
goûtez s'il est de bon goût ; dressez-le en passant la sauce à l'étamine, si
vous le jugez convenable, et servez bien chaud.
Et voilà ! Très
simple et vraiment délicieux, mais débrouillez-vous pour avoir des champignons, en octobre, ce n'est pas la mer à boire.
Un petit conseil supplémentaire : avant de vous lancer dans la cuisson du civet, faites mariner pendant toute une nuit le lièvre dépecé et découpé dans une préparation à base de vin rouge, céleri, carotte, oignon, romarin, sauge, laurier, ail, baies de genièvre et tout ce qui vous passe par la tête qui pourrait rappeler les saveurs d'un sous-bois.
Un petit conseil supplémentaire : avant de vous lancer dans la cuisson du civet, faites mariner pendant toute une nuit le lièvre dépecé et découpé dans une préparation à base de vin rouge, céleri, carotte, oignon, romarin, sauge, laurier, ail, baies de genièvre et tout ce qui vous passe par la tête qui pourrait rappeler les saveurs d'un sous-bois.
Sources : Almanach, 2ème année ; Le Gastronome français, ou l’Art de bien
vivre, 1828.
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