Octobre, mois des
pommes
En ce mois d’octobre, ayons une pensée pour nos amie·e·s
végétariens, ce qui n’est pas une mince affaire, car Grimod de La Reynière
parle peu des fruits, et pratiquement jamais des fruits. Alors, le fait en suffisamment
rare pour le souligner quand, dérogeant à la règle, il évoque en passant les
mérites des pommes.
Si dans la crainte de donner trop d'étendue à ce premier volume, nous
n'en avions pas rigoureusement exclu tout ce qui a rapport au dessert, et si même
nous ne nous étions pas imposé sur les fruits un silence Absolu, c'eût été ici
le lieu de placer les pommes, ce qui nous aurait conduits naturellement à les
voir frire en beignets, ou à figurer en charlottes. Ces deux plats, que nous ne
nommons à regret qu'en passant, sont, parmi les entremets sucrés, d'une
considération majeure.
La preuve :
Beignets de pommes
Pelez les pommes, ôtez-en le cœur et coupez-les en tranches
d’une ou deux lignes d’épaisseur ;
faites les macérer pendant deux heures avec un peu d’eau de vie, du sucre et de la canelle
en poudre. Après les avoir fait égoutter, trempez-les dans une pâte à
frire ; mettez-les dans une friture qui ne soit pas trop
chaude ; laissez prendre couleur ;
ensuite retirez la poêle du feu pour que les pommes cuisent ; lorsqu’elles
sont cuites, saupoudrez-les de beau sucre, et faites-les glacer avec la pelle
rouge*.
* pelle à glacer
Charlotte de pommes
Choisissez une vingtaine de belles pommes de reinette de
France, et commencez par les peler; supprimez-en les cœurs; émincez-les le plus
fin possible; mettez les dans un poêlon d'office, avec du sucre en poudre en
suffisante quantité, un peu de cannelle, le zeste de la moitié d'un citron et
une goutte d'eau : faites cuire vos pommes sur un feu assez vif, ayant
soin de les remuer, sans pour cela les trop écraser ; laissez-les
légèrement s'attacher, comme pour leur donner un goût de grillé ;
ajoutez-y un œuf d'excellent beurre ; mêlez bien le tout ; ôtez la cannelle
et le citron ; prenez une casserole ou un moule de la grandeur que vous voulez
avoir votre charlotte ;
coupez des tranches demie de pain mollet, larges de deux doigts, et assez longues
pour qu'en partant du centre de votre moule, elles viennent jusqu'au
bord ; trempez-les dans
du beurre fondu, et foncez-en votre moule, de
manière que ces mies se croisent comme à peu
près les lattes d'une jalousie de
croisée qui serait déployée ; remplissez votre moule de votre marmelade de
pommes, et ajoutez-y, si vous le voulez,
de la marmelade d'abricots, ou toute
autre confi
ture : finissez votre charlotte, en la couvrant de
vos lames
de pain beurré : faites-la partir sur un fourneau ; prenez garde
qu'elle ne brûle ; ensuite mettez-la au four ou sur une tourtière, en
l'entourant alors de braise : sa cuisson faite, et lorsqu'elle sera bien
colorée, retournez-la sur votre plat et servez-la chaudement.
Sources : Almanach des Gourmands (1ère
Année) ; Néo-Physiologie du goût par
ordre alphabétique (1839)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire