Mai, ou le retour des petits pois
Pois ramés, pois écossés ! C’est la chanson du mois de Mai, et cette musique plaît plus aux oreilles gourmandes que toutes ces savantes ariettes de l'Opera-buffa, qui ne disent rien à l'esprit ni au cœur. En effet, comment serait-on insensible à l'apparition du plus tendre, du meilleur et du plus délicat des légumes ? D'un légume qui nous procure à Paris quatre mois consécutifs d'indicibles jouissances, qui se marie avec toute espèce de viandes et de volailles, et qui par lui-même peut être considéré comme le Prince de l'entremets ?
Pois ramés, pois écossés ! C’est la chanson du mois de Mai, et cette musique plaît plus aux oreilles gourmandes que toutes ces savantes ariettes de l'Opera-buffa, qui ne disent rien à l'esprit ni au cœur. En effet, comment serait-on insensible à l'apparition du plus tendre, du meilleur et du plus délicat des légumes ? D'un légume qui nous procure à Paris quatre mois consécutifs d'indicibles jouissances, qui se marie avec toute espèce de viandes et de volailles, et qui par lui-même peut être considéré comme le Prince de l'entremets ?
Il faudrait un in-4° tout entier, et des plus épais encore, pour décrire les diverses préparations qu'on fait subir aux petits pois. On les sert à la crème, à la demi-bourgeoise, à la flamande, à la Rambouillet, au lard ; on en fait des potages au gras et au maigre, des purées vertes, variées à l'infini. On les met sous des tendrons de veau, sous des abatis de volaille, sous des pigeonneaux, sous des petites côtelettes parées, sous des pieds de mouton ; on les mêle avec des fricassées de poulet, des palais de bœuf, des oreilles de veau , etc.
Enfin, il n'est point d'animal sur la Terre ou dans les Cieux qui ne se tienne honoré de son alliance, et le tout pour la plus grande satisfaction de notre appétit.
Tant qu'on mangera des pois fins à Paris, l'on n'aura pas le droit de s'y croire malheureux, surtout lors qu'apprêtés en entremets par les mains d'un élève du grand Morillion*, bien maniés de beurre, privés de sauce, et liés en façon de mortier savant, ils se présenteront comme une montagne de verdure que chacun brûlera d'entamer.
* Il n’existe aucune trace du Grand Morillion ailleurs que dans les œuvres de La Reynière. Cuisinier de Laurent de La Reynière, il contribua, par son génie, à la renommée du Salon de la Madame de La Reynière. Nous en déduisons que l’élève de M. Morillion devait être unique, puisque son inventeur, c’est-à-dire La Reynière lui-même.
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