Après de longues et
patientes recherches, j’ai pu établir ce qu’aucun historien n’a pu: la date de création de la Société des Mercredis, société des plus débonnaires
qui allait animer la Vie Gourmande parisienne pendant près de 30 ans. C’était le mardi 18 avril 1781, il y a 116 ans. J’aurais pu attendre le jubilé des 150 ans, et priver mes amis Gourmands, Gourmets, Gastrophiles et Gastrographes d’une
lecture aussi divertissante qu’instructive, celle de l’épître dédicatoire de la
quatrième année de l’Almanach des Gourmands
(1806, chez Maradan, Libraire, rue des Grands-Augustins, n°9) que La Reynière
lui a dédiée. Nous avons reculé face à une telle perspective.
« ÉPITRE DÉDICATOIRE À LA SOCIÉTÉ DES
MERCREDIS
« MESSIEURS,
« La nécessité de
mettre chacun des nouveaux Volumes de l'Almanach
des Gourmands sous les auspices d'un personnage digne, par la finesse de
son goût et l'étendue de son appétit, d'en être le premier juge et le plus
ardent protecteur, devient pour nous, au commencement de chaque Année, un
véritable travail, souvent même un très-grand sujet d'embarras. Les hommes
comme M. d'Aigrefeuille* sont rares ; et nous nous sommes vu réduits, l'année
dernière, à dédier notre Ouvrage à un habitant des sombres bords.
Ce n'est pas, Messieurs,
que nous n'ayons depuis longtemps reconnu dans votre illustre Société, tout
ce qui constitue la réunion gourmande la plus savante, la plus complète et la
plus aimable. Dix-sept personnes qui , depuis vingt-quatre années, exercent
chaque semaine, en commun, leurs facultés dégustatrices ; à qui, dans ce long
espace de temps, il n'est rien échappé de tout ce qui peut honorer davantage le
palais, et stimuler plus dignement la sensualité ; dont les appétits dans tous
les genres ne se sont jamais arrêtés ni même ralentis ; dont le goût
constamment pur n'a jamais dévié ; dont l'admirable tact est devenu la règle de
conduite des plus grands cuisiniers; et dont les opinions font tellement loi
dans tout ce qui tient à la table, que le recueil des décisions de la SOCIÉTÉ
DES MERCREDIS, forme aujourd'hui la meilleure jurisprudence gourmande de
l'Europe. (…) Il importe aux progrès de
l'Art et à la gloire de la Gourmandise, que le Public connaisse enfin tout ce
qu'il vous doit. Il importe que l'illustre SOCIÉTÉ DES MERCREDIS prenne enfin le rang qui lui est dû et qu'elle travaille depuis tant d'années, et si scrupuleusement, à mériter. Les Gourmands avaient à cet égard,
depuis long-temps , un vœu à former ; et si nous osons nous en rendre aujourd'hui les interprètes, votre modestie seule pourrait nous en faire un
crime.(…)"
* : Fulcrand marquis d'Aigrefeuille,
fin gastronome, officier de bouche de Cambacérès.
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